Des enfants violents, de Mélanie Georgelin

Recension de: M. Georgelin, Des enfants violents. Clinique de l’extrême en ITEP et narrativité, Érès, « enfances&psy – la petite collection », 2021, 255p.

Lorsque l’on travaille auprès d’enfants ou d’adolescents accueillis en itep, il est courant d’entendre, dans les paroles des professionnels, les termes de « violents », « inadaptés », « difficiles », autant de qualificatifs qui n’ont que peu de valeur clinique mais viennent tenter d’exprimer nos impasses à nous identifier à leur souffrance.

Ces termes semblent être les seuls dont nous disposons pour venir nommer ce à quoi ils nous confrontent, et le risque serait de leur conférer une dimension identitaire, réduisant ces jeunes sujets à des objets bien différents de nous, des enfants monstrueux avec lesquels il ne serait pas possible de travailler et dont nous serions les étrangers. L’ouvrage de Mélanie Georgelin, résolument ancré dans une pratique clinique humanisante, réussit à dépasser cet écueil tout en faisant le pari audacieux de recourir à ce terme d’« enfant violent » comme analyseur de ces « cliniques de l’extrême ». En faisant bifurquer les logiques psychopathologisantes ordinaires, elle s’engage dans une analyse métapsychologique de ces enfances violentées, assignées à leurs symptômes, pour en ouvrir des voies fécondes d’une pratique clinique réputée difficile.

Face aux souffrances de leurs capacités identificatoires, Mélanie Georgelin y voit des « tentatives pour grandir, [qui] si elles ne sont pas prises au pied de la lettre, forment un point de rencontre. L’enfant y apparaît fragile et touchant. En effet, la périlleuse inscription de l’enfant dans une trame temporelle et langagière participe du sentiment d’étrangeté éprouvé dans la rencontre, il peut alors être bien difficile de s’identifier à lui. Lorsqu’on y parvient, c’est bien souvent de façon partielle : on s’identifie à tel aspect de son tempérament, de son histoire, de ses intérêts. On se retrouve en butte à la question de l’identité car, très vite, l’enfant lui-même vient questionner cela : est-il cet enfant méchant « viré de l’école » ? Est-il cet enfant monstrueux privé de parents ? Le problème de l’identité dans la clinique est incontournable car elle forme une certitude tout à fait délétère, elle vient boucher l’horizon. Comment la travailler, la mettre en mouvement pour éviter justement qu’elle ne se fige et ne se transforme en assignation ? » (p. 116).

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