Chronique d’un groupe d’analyse de la pratique dans une institution médico-sociale naissante
Il était une fois…
Il y a quelques années, j’ai eu l’occasion de rencontrer une institution, « La Maison »[1], que je devais accompagner dans le cadre de l’analyse des pratiques professionnelles. L’institution était jeune et n’existait que depuis peu. Pour ma part, j’étais jeune aussi et ma pratique débutait. Nous nous sommes rencontrés par le hasard d’une proposition et je ne sais pas si j’avais véritablement idée de ce dans quoi j’allais devoir m’engager. Pour autant, cela convenait bien à la jeunesse de l’institution. Toujours en train de rechercher ses appuis identitaires, incertaine sur son statut et son agrément, cette institution était une sorte d’annexe d’un autre établissement plus ancien, un Institut médico-éducatif. Fille de cette institution mère, « La Maison » était engagée dans un récent processus de croissance, d’émancipation et de tentative d’existence comme un objet à part entière.
Cet accompagnement s’écoula sur trois années, ce qui au regard d’une vie institutionnelle est bien peu, mais au regard du jeune âge de ce « patient particulier », ces trois années correspondaient sûrement à une sortie de l’état infantile de dépendance première et à une autonomisation propre à l’adolescence. « La Maison » avait pour fonction d’accueillir des adolescents et des jeunes adultes souffrant de déficience profonde avec des troubles de personnalité. Pour le dire autrement, les jeunes accueillis en son sein étaient atteints de déficience intellectuelle importante et présentaient des états psychotiques et autistiques associés. Certains n’avaient pas accès au langage et les conduites régressives étaient leurs seules modalités d’expression. D’autres avaient accès à la parole, mais étaient entravés par des stéréotypies et des troubles majeurs du comportement.
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Albert Ciccone, La violence dans le soin, Paris, Dunod, « Inconscient et culture », 2014, 313 pages.
ISBN : 978210070604
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[1] Afin de respecter l’exigence de confidentialité que suppose une telle publication, les éléments d’identification (nom, contexte, événements) ont été modifiés afin de rendre anonyme l’institution dont il est ici question.
Plan du chapitre
- Il était une fois…
- « On a analyse ! »
- « Bonne maman » : la mauvaise mère des éducateurs d’enfants autistes
- L’illusion d’un idéal ou comment faire du beau avec du rien
- Tractations et autres manœuvres perverses : tentatives pour dévoyer l’AP
- Les « troubles du compartiment » : des défenses obsessionnelles pour tenter d’organiser le chaos
- L’« effet mirage » de la réalité psychique subjective. Et si tout cela n’avait pas existé ?
- Pensées d’après-coup
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- Comment rendre l’autre fou ?
- De qui sommes-nous l’usager ? Vers la prise en compte d’une dépendance partagée
- Des « troubles envahissant la parentalité » ?
- Comment continuer à travailler ?